Tendez-moi votre main
Seigneur, j'ai peur. Mon âme en moi tressaille toute.
Je vois, je sens qu'il faut vous aimer. Mais comment
Moi, ceci, me ferai-je, ô vous Dieu, votre amant,
O justice que la vertu des bons redoute ?
Oui, comment ? Car voici que s'ébranle la voûte
Où mon coeur creusait son ensevelissement.
Et que je sens fluer à moi le firmament,
Et je vous dis : de vous à moi quelle est la route,
Tendez-moi votre main, que je puisse lever
Cette chair accroupie et cet esprit malade.
Mais recevoir jamais la céleste accolade,
Est-ce possible ? Un jour, pouvoir la retrouver
Dans votre sein, dans votre coeur qui fut le nôtre,
La place où reposa la tête de l'apôtre ?
Paul Verlaine
source: http://www.tressaint.com